Eastwood fait son “coming out” avec J. Edgar
J’peux t’dire que j’les aie à l’envers en écrivant c’foutu papier. Je reviens du cinéma, et ce soir, un grand homme du septième art vient tout juste de vendre son âme à une gamine écervelée pleurant toutes les larmes de son corps devant Titanic. Eh oui Eastwood fait désormais dans le navet sentimental ou, pour être plus précis, dans le « biopic » à l’eau de rose. Mais où est donc passé le Eastwood des westerns spaghetti : mal rasé, transpirant, le colt toujours prêt à dégainer, symbole de virilité ?
Dans J. Edgar, le vieux briscard d’Hollywood revient sur la vie public mais surtout privée du tyrannique patron du FBI de 1924 à 1972, J. Edgar Hoover. Côté vie public, le film n’évoque en rien les affaires qu’aurait entretenues ce controversé personnage avec la mafia. Mais il néglige également trop souvent la réalité politique et ne donne que trop peu de pistes historiques auxquelles se référer.
Finalement Eastwood ne s’intéresse pratiquement qu’à l’homme privé, méconnu, et à ses nombreuses névroses. La paranoïa, lorsque Hoover voit des communistes partout alors qu’il n’y en a plus nulle part. La Mythomanie, quand il se persuade d’avoir arrêté personnellement Dillinger, l’ennemi public numéro un. Et j’en passe. Mais le film insiste particulièrement sur la relation amoureuse ambiguë – à peine consommée - du chef du FBI avec son second, Clyde Tolson.
Ainsi, on assiste à toute une série de scènes d’amours, dans lesquelles les deux hommes dissimulent en substance leurs sentiments (du moins Hoover). Des non-dits qui provoquent d’ailleurs la seule scène d’action du film et reste le point culminant de leur relation : Tolson affligé par l’attitude de son alter égo se jette sur lui, le rue de coups, mais se retrouve au terme de la bagarre à l’embrasser tendrement… A la mort de J. Edgar, Tolson n’a plus que les yeux pour pleurer sur fond de musique mielleuse, tandis que Nixon, récemment élu président des Etats-Unis, se réjouit de ne plus avoir sur les bras « ce vieil enculé ».
Il fut un temps où j’avais une idole, une idole qui me permettait de ne pas me sentir seul dans ce monde de lavettes. Mon cœur vient d’être transpercé de la flèche empoisonnée de Cupidon, je ne pourrai plus jamais aimer…
Johnny 6 coups
Le Dieu du biopic ressuscite Hoover
Clint Eastwood, c’est presque un Dieu. Du moins celui du cinéma, ne blasphémons pas. Depuis ses premiers grands succès derrière la caméra (Mystic river, Million dollar baby, Gran torino,…), une aura l’entoure. Et chacun, cinéphile ou pas, se presse pour voir le dernier Eastwood. Je n’ai même pas eu à forcer cette mule de Johnny 6 coups, c’est pour dire !
Bon, on ne sort pas de la séance tout excité, ni forcément ému aux larmes. Certes. Mais après tout il ne s’agit pas d’un film d’action ni d’une comédie. C’est un de ces portraits de grands personnages historiques que notre ex-cowboy affectionne depuis Invictus. Et quel grand personnage que J. Edgar Hoover, créateur de l’agence sans laquelle la vérité ne serait pas ailleurs (mais alors où ?).
Difficile dans un film autobiographique de ne pas entrer en empathie avec le personnage croqué. En l’occurrence, un homme calculateur, maniaque, coléreux, couard et j’en passe.
Mais voilà, côté privé, c’est autre chose. Un homme sous l’emprise d’une mère intolérante, aux inclinaisons sexuelles mal assumées et en proie à de nombreux doutes (sauf sur la question Bolchevique bien entendu). Et quand il finit par poser la question « est-ce que je tue tout ce que j’aime », comment ne pas avoir pitié de lui ?
Côté acteur, ne pas louer les qualités de Leonardo Di Caprio serait mal venu, vu tout le maquillage qu’il s’est farci pour ressembler à un Hoover graba… vieilli. Mais la galerie de personnages grisonnants n’est pas très convaincante. Les yeux finissent toujours par trahir la jeunesse de l’âme.
Clint Eastwood réalisateur n’est pas du genre à faire des compromis, quitte à commettre quelques lourdeurs sur des passages purement symboliques. Comme la fin, qui pourrait se terminer quelques plans plus tôt. C’est le privilège de l’âge dira-t-on. Au final il y aura deux catégories de gens : ceux qui aiment les biopics, et ceux qui aiment inconditionnellement Clint Eastwood. Mais cette deuxième catégorie risque d’être déçue.
La messe est dite.
Ben XVI
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